dimanche 10 janvier 2010

Crépuscule


Il s'appelle Aurélien. Il s'appelle Aurélien, mon chéri, et pas toi. Voilà toute la différence. J'ai lutté, tu sais. J'ai essayé d'oublier, mais il est comme un fantôme qui me hante et qui ne veut pas partir. Je l'entends murmurer doucement dans mon oreille, qui m'appelle inlassablement. Aurore, Aurore... viens ! Oh si tu savais comment ses plaintes me sont insupportables.


Aurélien, attends-moi, je viens. Où es-tu ? J'ai retrouvé l'arbre de notre enfance, son tronc gelé par le froid d'hiver. Le champ de blé n'est plus qu'un immense hectare de terre enneigée. Il y a toujours ce lac givré sur lequel tu me faisais danser. Mais il manque ta présence. Sans toi cet endroit n'est plus rien, et Aurore se meurt à petit feu.

Je suis tellement désolée mon chéri. Je ne pouvais pas faire autre chose que partir, comprends-moi. Je suis assise devant mon passé, et j'ai froid, tellement froid. Je n'arrive pas à le quitter. Aurélien n'est pas là pour enrouler son écharpe autour de mon cou et je laisse le vent me glacer jusqu'au plus profond de moi. C'est si facile de rester ici, à espérer qu'il me revienne. Mon chéri, je t'ai aimé, crois-moi.

J'attends l'aube. Tu te souviens, Aurélien, de nos nuits d'été à attendre l'aube ? Mais maintenant c'est l'hiver, tout est différent. Il faut passer la nuit, et si je m'endors ici je ne me réveillerai jamais. Le froid m'a engourdie, il ralentit mes pensées. Oui, dormir... Rêver de toi, même si tu n'es qu'illusion. Mais il ne faut pas, car j'attends l'aube. J'attends l'aube... Aurélien, j'ai froid... J'ai sommeil... Viens me sauver.

Aurore... Tu lui as insufflé la vie, Aurélien. Et tu la lui as enlevée. Peut-être pensais-tu en avoir le droit, mais non, car Aurore ne t'appartenait pas. Tu te l'es appropriée, et tu l'as abandonnée. Elle n'a jamais eu qu'un passé. Ni présent ni futur, et c'est ta faute, Aurélien. Sa vie tournait autour de toi ; même ses dernières pensées t'ont été destinées. Je te hais pour ça. Elle a maintenant trouvé votre Lumière. Viens l'y rejoindre dès que tu pourras, car je sais qu'elle t'attend toujours. Mais en attendant, vis avec ta culpabilité Aurélien.